Pour flûte alto, violoncelle et ensemble

Durée : 17′

sur un poème de Fernando Pessoa
Commander la partition

Commande de l’Ensemble Contrechamps
Nomenclature : 1, 1, 1, 1; 1,1,1,0 ; 2 perc.; piano; 2,2,2,2,2 + chœur instrumental (clar.basse ; cor en fa ; vla)

Éditions PAPILLON

Création : le 9 novembre 2004 • World New Music Days 04 • Genève

Ensemble Contrechamps
  • Flûte alto : Félix Renggli
  • Violoncelle : Daniel Haefliger
  • Direction : Jurjen Hempel

écoutez…


Des mélodies comme des chants sans paroles

Elles sont destinées aux deux instruments solistes, le violoncelle et la flûte. Pourtant ces mélodies sont dans l’attente, comme devant franchir le premier masque : l’ensemble instrumental. Dans son Sonnet VIII, Fernando Pessoa se demande si  » l’âme sait qu’est tombé le dernier masque et qu’enfin son visage est nu « . Ce vers du poète portugais, ici dissimulé par l’emploi de l’anglais, me poursuit, m’habite depuis quelques années. Le centre de l’œuvre aimerait être le reflet d’une présence, d’un visage lointain, presque perdu derrière les masques. Il s’agit pour moi du choeur instrumental, ruines d’une écriture chorale, souvenir d’une fleur dont on possède aujourd’hui le fruit.

VIII.
How many masks wear we, and undermasks,
Upon our countenance of soul, and when,
If for self-sport the soul, itself unmasks,
Knows it the last mask off and the face plain ?
The true mask feels no inside to the mask
But looks out of the mask by co-masked eyes.
Whatever consciousness begins the task
The task’s accepted use to sleepness ties.
Like a child frighted by its mirrored faces,
Our souls, that children are, being thought-losing,
Foist otherness upon their seen grimaces
And get a whole world on their forgot causing;
And, when a thought would unmask our soul’s masking,
Itself goes not unmasked to the unmasking.

by Fernando Pessoa

VIII.
Combien de masques portons-nous, et de masques
Sous le masque, sur la figure de notre âme, et quand,
Si pour son propre amusement l’âme elle-même se démasque,
Sait-elle qu’est tombé le dernier et qu’enfin son visage
Est nu ? Le vrai masque ne sent rien en deçà du masque,
Mais regarde à travers le masque avec des yeux masqués
Aussi. Quelque conscience qui entreprenne la tâche,
Oeuvrer à cette tâche au sommeil l’attache.
Comme un enfant effrayé par le reflet de son visage,
Nos âmes, qui sont des enfants – car elles égarent leurs pensées,
Remettent de la différence sur leurs trop visibles grimaces
Et gagnent tout un monde en oubliant leurs causes.
Et quand une pensée démasquerait notre âme se masquant,
Même elle n’irait pas sans masque démasquer.

by Olivier Amiel